Trois questions à Marc Durif, nouveau Directeur exécutif du LCSQA
Début mai, Marc Durif prenait ses fonctions de Directeur exécutif du Laboratoire Central de Surveillance de la Qualité de l’Air (LCSQA). Après une première phase de rencontre des représentants des acteurs du dispositif et de prise de connaissance des dossiers, il revient sur son itinéraire et sa perception du LCSQA.
Bonjour Marc et bienvenue ! Avant tout, pouvez-vous revenir sur vos expériences en qualité de l’air ?
Mon parcours professionnel m’a permis d’aborder plusieurs domaines de la qualité de l’air. D’abord au Citepa où j’ai participé à plusieurs études technico-économiques sur les polluants atmosphériques ainsi qu’à l’élaboration de la première méthodologie d’inventaire des émissions atmosphériques par agent économique. J’ai rejoint ensuite l’Ineris où j’ai conduit des travaux sur la mesure des émissions atmosphériques industrielles et des concentrations des polluants dans l’air dans différents contextes de surveillance comme les expositions professionnelles, l’air intérieur d'établissements recevant du public, le voisinage des installations classées ou lors de crises environnementales. Ces expériences m’ont permis d’occuper des postes d’expertises puis de management à l’interface d’équipes pluridisciplinaires et au contact de différents acteurs de la qualité de l’air comme les industriels, experts et chercheurs, services de l’Etat et collectivités, agences et associations. J’ai toujours eu à cœur d’intégrer de nouveaux outils aux approches de surveillance comme les bio-indicateurs, les instruments à long trajets optiques, les capteurs individuels et plus récemment les drones.
Comment décririez-vous le rôle du LCSQA et qu’est-ce qui vous a motivé à le rejoindre ?
Le LCSQA apporte un appui technique et scientifique au ministère en charge de l’environnement et aux AASQA pour la surveillance réglementaire de la qualité de l’air ambiant. Notre objectif est de garantir un dispositif de surveillance fiable, réactif et capable d’anticiper les besoins de demain. Il mobilise aujourd’hui une soixantaine d’experts ainsi que des moyens expérimentaux et numériques de pointe répartis entre ses trois membres (IMT Nord Europe, Ineris, LNE), les observatoires nationaux comme CARA et MERA ou l’infrastructure de recherche européenne ACTRIS. Ces experts sont, chaque année, engagés dans environ 70 études techniques, l’audit technique régulier des AASQA et l’animation de près d’une dizaine de groupes de travail thématiques associant les AASQA. Ces travaux s’inscrivent également dans le paysage européen et de la recherche avec la participation des experts du LCSQA à une vingtaine de groupes de travail d’instances européennes comme le CEN, l’Ambient Air Quality Expert Group, AQUILA et FAIRMODE ou en co-finançant des thèses et travaux de recherche des guichets nationaux ou d’Horizon Europe. Cette implication permet de produire et partager des connaissances nouvelles sur la qualité de l’air. Ces 20 dernières années, c'est plus de 1 000 publications sous différentes formes, la production ou la mise à jour de 3 à 5 nouveaux documents de référence par an qui viennent enrichir le Référentiel Technique National. C'est aussi la mise à disposition du grand public de plus de 170 millions de données de référence mesurées par les AASQA et mises à jour en temps réel sur la plateforme Geod’air. Le LCSQA est au cœur d’un dispositif assez unique en Europe avec une communauté d’acteurs comme le Ministère de la Transition Ecologique et de la Cohésion des territoires, Atmo France, les AASQA et Prev’Air dont les compétences et les expertises sont un environnement de travail très stimulant. Je suis vraiment heureux d’avoir pu rejoindre ses équipes.
Quels seront les prochains défis à relever pour le LCSQA ?
La surveillance de la qualité de l’air est en perpétuelle évolution. Nous avons d’un côté des exigences à atteindre qui se renforcent régulièrement avec par exemple la prochaine révision de la Directive de la Qualité de l’air et la Commission européenne qui va probablement proposer d’introduire de nouveaux seuils et de nouvelles substances à surveiller. Le dispositif a cependant commencé à l’anticiper en travaillant sur une liste de polluants d’intérêt national comme les particules fines ou les pesticides. Pour ces polluants, le LCSQA a proposé de premières stratégies de surveillance harmonisées et concertées au niveau national. Il pourrait être néanmoins nécessaire de les compléter en fonction de l'évolution de la Directive. D’un autre côté, nous avons vu ces dernières années l’apparition de nouvelles techniques permettant d’accéder à des résolutions spatio-temporelles inédites grâce à une instrumentation allant du système capteurs aux données d’observation des satellites. Il y aussi l’arrivée d’approches disruptives comme l’utilisation du potentiel oxydant qui pourrait servir d'indicateur d'effets sanitaires de mélange de polluants atmosphériques. Là encore, le LCSQA a commencé à accompagner certaines de ces évolutions technologiques en développant des algorithmes « open-source » pour réaliser des cartographies à partir de systèmes capteurs mobiles ou en réalisant des pré-tests de contrôle qualité de la mesure du potentiel oxydant. Ces travaux devront être poursuivis pour s‘assurer de la pertinence et des conditions d’un transfert opérationnel de ces nouveaux outils. Ils pourraient permettre d’évoluer vers un dispositif permettant de mieux évaluer les sources et les impacts de la qualité de l’air. Je dirais que notre principal défi est d’arriver avec les acteurs du dispositif et dans un contexte budgétaire contraint, à maintenir un haut niveau de qualité et d’accessibilité des données produites actuellement tout en préparant la surveillance de demain !
contact : direction-lcsqa@ineris.fr
crédit photo : Franck Dunouau